ROJO
Du 03/07/2019 au 16/07/2019
PRIX DU MEILLEUR RÉALISATEUR ET PRIX DU MEILLEUR ACTEUR • FESTIVAL DE SAN SEBASTIAN 2018
Argentine, années 70. Claudio, avocat d’une petite ville apparemment tranquille, ne voit pas d’un bon œil l’arrivée d’un détective privé dans son quotidien. Habitué à l’impunité, jouant des codes dans une société malléable et sans scrupule, il se méfie de cet étranger qui fouille dans une affaire dans laquelle il trempe pleinement...
Le scénario raconte l’arrivée de la dictature militaire en Argentine, avec son triste lot de disparitions. L’écriture ne fait qu’effleurer le contexte, le présentant plutôt comme une toile de fond, préférant axer son récit sur l’implication indirecte de la société civile dans ces événements. Rojo dresse un portrait collectif qui s’attarde sur plusieurs classes sociales : de la plus haute – avec le personnage incarné par l’excellent Dario Grandinetti – à la plus petite. On baigne dans une communauté où le mal, à la faveur d’un contexte particulier, règne. Pourtant, en apparence, tout va bien. Disparaître n’a rien d’anormal et voler n’est pas sanctionné. Le quotidien, en tension, est habité par quelque chose de latent.
Derrière ses allures de western, avec ses confrontations verbales et ses longs regards échangés, Rojo brille par sa réalisation. La photographie soignée capte une très belle reconstitution des années 70, la bande-son contribue à installer un sentiment de malaise, le film joue sur les nuances... Benjamín Naishtat dépeint de manière singulière l’hypocrisie d’une ville qui tire profit de la dictature. Les convictions politiques et religieuses trouvent une limite face à l’impunité d’une situation où le crime est sans châtiment : il montre la lente et passionnante délitescence d’une société, dans un polar décalé et très bien incarné qui mérite assurément le coup d’œil.
(D’après Pierre Larvol • retro-hd.com)