MIRACLE

Irena, femme taciturne entre deux âges, est la gérante rigoureuse d'une ferme porcine constituée en coopérative ouvrière dans un village lituanien. Nous sommes au début des années 90, période de chamboulements géopolitiques : après la chute de l'Union Soviétique, la Lituanie vient d'acquérir son indépendance. Cette période de transition crée à la fois une crise économique menaçant l'entreprise locale – au bord de la faillite – et une soif de changement de la part des habitant-e-s du village qui remettent sérieusement en question la gestion d'Irena. Cette dernière se démène pourtant comme elle peut, mais seul un miracle pourrait la sortir de cette situation... C'est à ce moment précis que débarque Bernardas, homme d'affaires américain d'origine lituanienne, hâbleur et arrogant. Il prétend que la ferme occupe l'ancienne terre de ses parents : il se propose donc de la racheter et de la moderniser. Ses intentions ont beau sembler aussi douteuses que la couleur orangée de ses cheveux, les billets verts qu'il distribue à la moindre occasion séduisent la population au détriment d'Irena, qui est en plus forcée d'héberger sur son canapé ce personnage incongru...

Il y a quelque chose d'Aki Kaurismaki dans ce Miracle et dans sa manière de traiter par l'absurde et avec un humour pince-sans-rire des situations socio-économiques bien réelles et plutôt difficiles. Le film prend ainsi des airs d'allégorie politique, dénonçant les mirages du capitalisme et son avènement abrupt au lendemain de la chute du bloc soviétique. Une critique subtile et doucement satirique, remarquablement mise en scène : format 4/3, couleurs passées et esthétique vintage font revivre sous nos yeux une époque révolue. Ce petit village perdu dans un coin méconnu du monde nous offre alors une démonstration politique pertinente, sans concession et cependant désopilante.