LES CHATOUILLES

La petite Odette, devenue jeune trentenaire, finit dans le bureau d’une psy. Pour la première fois, elle rompt la loi du silence et de la honte : elle a été abusée, violée, dans son enfance... par le meilleur ami de ses parents. Comment hurler que cet homme si apparemment normal – et admiré par son père et sa mère parce qu’il a bien réussi dans la vie – est un malade, une ordure ? Comment raconter qu'il s’enfermait avec elle dans la salle de bains et la culpabilisait quand elle essayait de murmurer « non » ?

Au départ, le film inquiète un peu dans ses libertés de mise en scène, mais très rapidement nous devenons complices de chaque petite trouvaille visuelle et narrative : l’imagination devient une arme contre la douleur, les lieux et les époques s’emboîtent, les souvenirs passent par les portes du cabinet de la psy ou de la chambre d’Odette comme à travers les cloisons amovibles d’une maison de poupée. L’enfance garde son mot à dire, même si la réalisatrice-danseuse-actrice est devenue, adulte, une boule d’énergie, de rage solaire, de muscles tendus... Cette histoire est celle d'Andréa Bescond elle-même : il fallait l'avoir vécue pour savoir la raconter avec autant de justesse, pour donner à saisir toutes ces étapes nécessaires à la reconstruction tout en conservant un ton léger, bouleversant de simplicité. Les chatouilles n'épargne personne mais laisse la place au pardon. Toutes ces nuances en font un film absolument essentiel : parce que jamais la pédophilie n'avait été racontée au cinéma comme ça, avec autant de vérité, et parce qu'il était grand temps que ce soit le cas !

(D'après Guillemette Odicino • Télérama)