LA ZONE D'INTÉRÊT

GRAND PRIX • FESTIVAL DE CANNES 2023

Le commandant d’Auschwitz et sa femme s’efforcent de construire une vie de rêve pour leur foyer dans une maison juste à côté du camp.

Dix ans après Under the skin, Jonathan Glazer se penche pour la première fois sur un fait historique tout en restant fidèle à son univers singulier. La mise en scène impeccable et austère illustre parfaitement le ton glaçant du film. L’ambiance sonore cadence l’intrigue et provoque une tension immédiate. Certaines scènes nous laissent sans voix et nous déstabilisent particulièrement par le fait qu'elles se déroulent quasi exclusivement dans la maison et le jardin de cette famille. La caméra ne franchit que très rarement le mur. L’effet provoqué en est d’autant plus fort que tout est à imaginer, surtout quand on sait les atrocités commises dans les camps d’extermination. 

Oeuvre psychologique puissante, La zone d’intérêt nous bouscule à partir d'une réalité dérangeante. Les protagonistes – eux-mêmes enfermés dans une culpabilité et une prospérité factice à première vue inébranlable – sont des êtres humains, autrement dit nos semblables. Leur existence, comme n’importe laquelle, n’est pas dénuée de failles. À l’écran, ce cocon en apparence paisible et bucolique est malgré tout ébranlé par de subtils effets visuels et sonores à travers lesquels le génocide mitoyen se manifeste, plus terrible que jamais. La zone d’intérêt est un territoire cinématographique poignant qui ausculte en profondeur la noirceur de l’âme humaine.