FARGO
Le 20/07/2016
PRIX DE LA MISE EN SCÈNE • FESTIVAL DE CANNES 1996
COPIE NUMÉRIQUE RESTAURÉE
Quelque part dans le Minnesota, en plein hiver. Jerry Lundegaard, directeur d’une concession automobile au bord de la faillite mais, par ailleurs, doté d’un riche beau-père, a l’idée de sa vie : faire enlever sa propre femme par deux tocards à qui le beau-père versera la rançon...
Fargo vaut d’abord par ses personnages. Dès lors qu’apparaît Jerry Lundegaard, sourire de hamster jovial contredit par un regard douloureux, on sait que ce benêt n’est pas né sous une bonne étoile. Tout le contraire de la policière Marge Gunderson, épouse heureuse et future mère comblée, sorte de Droopy sanglé dans un uniforme... Jerry et elle ont la même obstination tranquille, qui aurait pu les réunir si le destin ne s’en était mêlé. Et c’est avec la même application jusqu’au-boutiste que les deux crétins kidnappeurs vont semer la désolation. Ainsi va Fargo, dans une horreur croissante mais tranquille, ponctuée des gestes et des mots de tous les jours, d’un train-train de petites manies et de vieilles habitudes. Ces personnages simples pris dans la glace d’une situation inextricable, puis ces corps en morceaux dans une nature immuable finissent par dessiner une vraie tragédie, celle de la violence banale, donc fatale. On songe à Continents à la dérive, de Russell Banks : un jour, un type dérape, et la mort atroce est au bout du chemin. C’est la dérive des gens ordinaires, pris dans la spirale de l’échec : l’échec, ce vieux cauchemar américain.
(D’après Vincent Remy • Télérama)